LE CUBISME DE MARIA BLANCHARD (1881-1932)

 

LE CUBISME DE 

MARIA BLANCHARD (1881-1932)



La Chanson du mal-aimé est un long poème lyrique de Guillaume Apollinaire, inspiré par l'échec de sa relation amoureuse avec Annie Playden. Ce poème est une pièce maîtresse du recueil Alcools. Ce poème évoque la tristesse et l'impuissance face à son amour impossible. Il est publié en 1913.


LA POÉSIE DU JOUR

La Chanson du mal-aimé

Guillaume Apollinaire

à Paul Léautaud


Et je chantais cette romance

En 1903 sans savoir

Que mon amour à la semblance

Du beau Phénix s’il meurt un soir

Le matin voit sa renaissance.


Un soir de demi-brume à Londres

Un voyou qui ressemblait à

Mon amour vint à ma rencontre

Et le regard qu’il me jeta

Me fit baisser les yeux de honte


2


Je suivis ce mauvais garçon

Qui sifflotait mains dans les poches

Nous semblions entre les maisons

On de ouverte de la Mer Rouge

Lui les Hébreux moi Pharaon


Oue tombent ces vagues de briques

Si tu ne fus pas bien aimée

Je suis le souverain d’Égypte

Sa soeur-épouse son armée

Si tu n’es pas l’amour unique


Au tournant d’une rue brûlant

De tous les feux de ses façades

Plaies du brouillard sanguinolent

Où se lamentaient les façades

Une femme lui ressemblant


3


C’était son regard d’inhumaine

La cicatrice à son cou nu

Sortit saoule d’une taverne

Au moment où je reconnus

La fausseté de l’amour même


Lorsqu’il fut de retour enfin

Dans sa patrie le sage Ulysse

Son vieux chien de lui se souvint

Près d’un tapis de haute lisse

Sa femme attendait qu’il revînt


L’époux royal de Sacontale

Las de vaincre se réjouit

Quand il la retrouva plus pâle

D’attente et d’amour yeux pâlis

Caressant sa gazelle mâle


4


J’ai pensé à ces rois heureux

Lorsque le faux amour et celle

Dont je suis encore amoureux

Heurtant leurs ombres infidèles

Me rendirent si malheureux


Regrets sur quoi l’enfer se fonde

Qu’un ciel d’oubli s’ouvre à mes voeux

Pour son baiser les rois du monde

Seraient morts les pauvres fameux

Pour elle eussent vendu leur ombre


J’ai hiverné dans mon passé

Revienne le soleil de Pâques

Pour chauffer un coeur plus glacé

Que les quarante de Sébaste

Moins que ma vie martyrisés


5


Mon beau navire ô ma mémoire

Avons-nous assez navigué

Dans une onde mauvaise à boire

Avons-nous assez divagué

De la belle aube au triste soir


Adieu faux amour confondu

Avec la femme qui s’éloigne

Avec celle que j’ai perdue

L’année dernière en Allemagne

Et que je ne reverrai plus


Voie lactée ô soeur lumineuse

Des blancs ruisseaux de Chanaan

Et des corps blancs des amoureuses

Nageurs morts suivrons-nous d’ahan

Ton cours vers d’autres nébuleuses


Je me souviens d’une autre année

C’était l’aube d’un jour d’avrilJ’ai chanté ma joie bien-aimée

Chanté l’amour à voix virile

Au moment d’amour de l’année


Guillaume Apollinaire, Alcools, 1913




QUELQUES MOTS SUR LA CONCEPTION DE CE POÈME

La conception de ce poème remonte vraisemblablement à 1904, mais sa date d'achèvement n'est pas connue. Il est publié dans le Mercure de France le 1er mai 1909, grâce au soutien de l'écrivain et critique Paul Léautaud.

Le texte prend sa forme définitive en 1913, à l'occasion de sa publication dans Alcools. C'est l'année où la compagne d'Apollinaire, Marie Laurencin, lassée d'être battue par un alcoolique l'abandonne définitivement, lui préférant Nicole Groult. Apollinaire publie le texte avec une épigraphe adressée à Paul Léautaud, qui l'avait soutenu.

Il y joint aussi le passage connu sous le titre de « Réponse des cosaques zaporogues au Sultan de Constantinople ».




EN QUOI APOLLINAIRE EST UN POÈTE CUBISTE ?

Guillaume Apollinaire est souvent considéré comme un poète cubiste en raison de sa proximité avec les artistes cubistes (comme Picasso ou Braque) et de l’influence de ce mouvement sur son écriture.

Comme les peintres cubistes qui décomposent les objets pour en montrer plusieurs angles simultanément, Apollinaire morcelle le réel dans ses poèmes.  Par exemple* : Dans "Zone" (Alcools, 1913), les images se succèdent sans transition, mêlant modernité et tradition, Paris et la mythologie. 

Apollinaire abandonne la ponctuation dans Alcools (1913), créant une fluidité qui rappelle les contours brisés du cubisme. Les mots et les images se superposent, comme les plans dans une toile de Picasso. 



Dans Calligrammes (1918), les mots dessinent des formes (une colombe, une tour Eiffel…), fusionnant texte et image. Cette approche visuelle rappelle l’importance de la composition spatiale chez les cubistes. 

Ses poèmes mêlent passé, présent et futur, comme les cubistes fusionnent différents moments dans une même toile.  Par exemple : "Le Pont Mirabeau" juxtapose la fuite du temps et l’éternité cyclique.  Apollinaire était critique d’art et défendait le cubisme (Les Peintres cubistes, 1913). Sa poésie transpose leurs innovations dans le langage. 

Apollinaire ne copie pas le cubisme, il l’adapte à la poésie. Il crée une écriture où le monde est recomposé par l’imagination, libérée des règles classiques—une véritable "cubisation" du langage. 




ANALYSE DU POÈME D'APOLLINAIRE

Dans cette fantasmagorie de 60 quintils (300 vers) octosyllabiques, Apollinaire développe une référentialité souvent mythique et épique, entre figures historiques « exotiques » (Pharaon, la femme de Mausole, les Quarante de Sébaste, les Cosaques zaporogues mais aussi le roi « fou » Louis II de Bavière), figures mythologiques (le dieu Pan, Ulysse et Pénélope, l'indienne Sacontale) et peuples ou bestiaire inventés (les « pyraustes », les « Égypans », les « chibriapes », les « Bé-Rieux »…), à quoi il mêle des descriptions de la vie urbaine moderne et l'émouvante exploration de son intimité sentimentale.

Le ton général ici est celui d'une complainte, le poète voguant entre regrets, rêveries consolatrices et la dure acceptation d'un présent douloureux.

À trois reprises l'énonciation s'en écarte radicalement : bucolisme mi-ironique mi-naïf de « Aubade chantée à Laetere un an passé », agressivité moqueuse de la « réponse des Cosaques Zaporogues au Sultan de Constantinople », poésie hermétique (allusions érotiques, mystiques et alchimiques) des « Sept Épées » ; trois moments qui sont autant de poèmes dans le poème.

La juxtaposition des tons, des sentiments, des points de vue rapproche ce poème de l'esthétique cubiste.

Les rimes sont de la forme « ABABA ».

Les cinq premiers quintrains ils parlent du voyage à Londres.




BIOGRAPHIES DE MARIA BLANCHARD (1881-1932)

LES DÉBUTS EN ESPAGNE

Maria Blanchard, née María Gutiérrez-Cueto y Blanchard le 6 mars 1881 à Santander, est issue d’une famille cultivée. Dès son jeune âge, elle montre un talent pour la peinture malgré une malformation physique qui marque profondément sa vie. En 1903, elle commence ses études artistiques à Madrid auprès de maîtres comme Emilio Sala Francés. En 1909, grâce à une bourse, elle s’installe à Paris pour poursuivre sa formation à l’Académie Vitti sous la direction d’artistes tels qu’Anglada Camarasa et Kees van Dongen. C’est là qu’elle découvre les avant-gardes européennes.


L'AVENTURE CUBISTE

Après un bref retour en Espagne pendant la Première Guerre mondiale, Blanchard revient à Paris en 1916. Elle se lie avec des figures majeures du cubisme comme Juan Gris, André Lhote et Jacques Lipchitz. Ses œuvres cubistes se distinguent par leur traitement audacieux des formes humaines et leur expressivité unique. Elle expose régulièrement dans des galeries prestigieuses comme L’Effort Moderne de Léonce Rosenberg. Parmi ses œuvres emblématiques figurent Femme à l’éventail (1916) et Nature morte cubiste (1917), conservées dans des musées tels que le Musée Reina Sofía à Madrid.


LE RETOUR À L'ORDRE

Dans les années 1920, Blanchard adopte un style plus figuratif tout en conservant des éléments cubistes. Ses tableaux comme La Communiante (1920) ou Maternité (1924) explorent des thèmes intimes et religieux avec une palette riche en contrastes nacrés. Malgré son succès artistique, elle traverse des périodes de grande précarité financière et de solitude. Très affectée par la mort de son ami Juan Gris en 1927, elle sombre dans une profonde dépression.


LA FIN DE SA VIE

Maria Blanchard meurt prématurément le 5 avril 1932 à Paris des suites d’une tuberculose. Elle laisse derrière elle un héritage artistique remarquable qui continue d’influencer les générations actuelles.




POURQUOI LE CUBISME EST POPULAIRE ?

Le cubisme est devenu populaire pour plusieurs raisons, à la fois artistiques, culturelles et historiques.

Le cubisme (vers 1907-1914, initié par Pablo Picasso et Georges Braque) a brisé les conventions de la perspective traditionnelle. Au lieu de représenter le monde en 3D de manière réaliste, les cubistes ont décomposé les objets en formes géométriques (cubes, cylindres, sphères) et montré plusieurs angles en même temps. Cette approche radicale a captivé les artistes et le public en quête de modernité.

Picasso s'est inspiré des masques africains et de l’art ibérique, dont les formes stylisées et expressives ont nourri le cubisme (ex. : *Les Demoiselles d’Avignon*, 1907). Cette rupture avec l’art classique européen a attiré l’attention des avant-gardes.

Le cubisme a séduit les intellectuels et les artistes qui cherchaient à représenter la réalité autrement. Des écrivains comme Guillaume Apollinaire l’ont défendu, liant art et littérature (ex. : le cubisme littéraire). Les cubistes ont aussi introduit des collages (papiers, journaux), mélangeant art et objets du quotidien.

Au début du XXe siècle, Paris était la capitale artistique mondiale. Des galeries (comme celle de Daniel-Henry Kahnweiler) et des collectionneurs ont soutenu le cubisme, malgré les critiques initiales. Son influence s’est étendue à d’autres mouvements (futurisme, constructivisme, abstraction).


Le cubisme n’était pas un style uniforme : 

- Cubisme analytique (1909-1912) : formes fragmentées, couleurs sobres. 

- Cubisme synthétique (après 1912) : couleurs vives, motifs plus décoratifs. 

Cette variété a permis à différents publics de s’y intéresser.


Même après son apogée (années 1920), le cubisme a inspiré le design, l’architecture (Le Corbusier), et la publicité. Son langage visuel est devenu un symbole de modernité.

Le cubisme a marqué l’histoire de l’art parce qu’il a réinventé la représentation du réel, en phase avec les bouleversements du XXe siècle (science, vitesse, guerre). Aujourd’hui, il reste populaire car il incarne la liberté créatrice et continue d’influencer les artistes contemporains. 




UNE MUSIQUE D'UN BONHEUR CONTAGIEUX

"La chanson du mal aimé" Léo Ferré

https://youtu.be/zkFkFn3tT7w?si=koBiFiSPGqHFYhbe



Disparu il y a 30 ans, le 14 juillet 1993, Léo Ferré a produit une œuvre musicale colossale, dont se détache notamment un travail régulier de mise en musique des grands poètes : Apollinaire, Baudelaire, Aragon, Verlaine, Rimbaud et d'autres. 

Libertaire, tendre, enragé, provocateur, émotif, théâtral, Léo Ferré était un amoureux des mots qui rêvait de "faire entrer la poésie dans les juke-box". Pari tenu avec Rimbaud, Verlaine, Aragon, Apollinaire… mais aussi avec ses plus grandes chansons.



VOUS AVEZ BON GOÛT !​ 

Ce qui m'anime dans cette quête c'est la curiosité intellectuelle, le goût de la connaissance et l'envie de savoir. Si vous êtes comme moi, avec l'envie d'apprendre, aux rivages de la beauté musicale, picturale, poétique​.​


CULTURE JAI 

(​L'Histoire de l'Art​ en Musique)

https://vincentdelaplageculturejai.blogspot.com/

LES LUMIÈRES DE VERSAILLES

​(Histoire Moderne en Musique)​

https://leslumieresdeversailles.blogspot.com/

SING SANG SUNG  

(Pop anglaise traduite)​

https://singsangsungenglishmusic.blogspot.com/

CINÉ CINÉMA  

(Netflix)​

https://cinecinemavincent.blogspot.com/


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