LA SAINTE CÉCILE, AVEC LA PEINTURE DE HENDRICK TER BRUGGHEN (1588-1629)
LA SAINTE CÉCILE,
AVEC LA PEINTURE DE
HENDRICK TER BRUGGHEN
(1588-1629)
La musique souvent me prend comme une mer !
Vers ma pâle étoile,
Sous un plafond de brume ou dans un vaste éther,
Je mets à la voile ;
La poitrine en avant et les poumons gonflés
Comme de la toile
J'escalade le dos des flots amoncelés
Que la nuit me voile ;
Je sens vibrer en moi toutes les passions
D'un vaisseau qui souffre ;
Le bon vent, la tempête et ses convulsions
Sur l'immense gouffre
Me bercent.
D'autres fois, calme plat, grand miroir
De mon désespoir !
Les Fleurs du mal - Spleen et Idéal -
Charles Baudelaire
POURQUOI CE POÈME REVIENT À MA MÉMOIRE ?
Le poème "La Musique" de Charles Baudelaire, extrait des Fleurs du Mal (1857).
Baudelaire utilise la musique comme métaphore pour explorer des sentiments profonds et universels, tels que la mélancolie, l'exaltation, la douleur et la transcendance. Le poème décrit comment la musique peut toucher l'âme et réveiller des émotions intenses, parfois contradictoires. Par exemple, il évoque :
"La musique souvent me prend comme une mer !"
Cette comparaison avec la mer suggère à la fois la puissance, l'immensité et l'impuissance face à une force qui nous dépasse.
Baudelaire est un maître de l'évocation sensorielle. Dans "La Musique", il utilise des images fortes et des sensations physiques pour traduire l'effet de la musique sur le corps et l'esprit. Par exemple :
"Je sens vibrer en moi toutes les passions / D'un vaisseau qui souffre."
Ces vers montrent comment la musique peut provoquer des vibrations intérieures, comme si l'âme était un navire ballotté par les vagues des émotions.
Le poème lui-même est construit comme une partition musicale. Les vers, avec leurs rythmes et leurs sonorités, imitent le flux et le reflux de la musique. Les répétitions, les enjambements et les contrastes entre calme et tempête créent une cadence qui rappelle les mouvements d'une symphonie. Par exemple :
"Je sens l'horreur des grandes eaux / Et le calme plat, miroir / De mon désespoir."
Ces vers alternent entre agitation et apaisement, reflétant les variations d'une œuvre musicale.
La musique, dans ce poème, devient un symbole de l'aspiration humaine à l'idéal et à l'infini. Elle représente à la fois une échappatoire et une confrontation avec les profondeurs de l'âme. Baudelaire explore l'idée que la musique peut révéler des vérités cachées et nous transporter vers des états de conscience supérieurs. Par exemple :
"Je vois ma propre image / Dans le miroir de l'onde."
Cette image suggère que la musique agit comme un miroir, reflétant les aspects les plus obscurs et les plus lumineux de notre être.
Comme souvent chez Baudelaire, le poème explore une dualité fondamentale : ici, entre la souffrance et l'extase, le chaos et l'harmonie. La musique est à la fois une source de tourment et de consolation, un moyen de se perdre et de se retrouver. Cette ambivalence est au cœur de l'éloquence du poème, car elle reflète la complexité de l'expérience humaine.
Enfin, le poème est éloquent par sa propre musicalité. Baudelaire joue avec les sonorités, les allitérations et les assonances pour créer une mélodie poétique. Par exemple :
"Je plane sur le gouffre, au rythme de la brise."
Ces vers sont presque chantants, renforçant l'idée que la poésie et la musique sont intimement liées.
En quelques mots comme en mille,"La Musique" est un poème éloquent parce qu'il parvient à capturer l'essence ineffable de la musique à travers des images puissantes, une structure rythmique soignée et une exploration profonde des émotions humaines. Baudelaire y démontre sa capacité à transformer une expérience sensorielle en une méditation universelle sur l'art, l'âme et la condition humaine.
QUI ÉTAIT HENDRICK TER BRUGGHEN ?
Hendrick ter Brugghen (1588-1629) est un peintre néerlandais de l'âge d'or hollandais, connu pour ses contributions significatives au mouvement artistique du caravagisme dans les Provinces-Unies. Né à La Haye en 1588, ter Brugghen a passé une grande partie de sa vie à Utrecht, une ville qui a joué un rôle clé dans la diffusion du style de Caravage en Europe du Nord.
Ter Brugghen a commencé sa formation artistique auprès du peintre maniériste Abraham Bloemaert à Utrecht. Cependant, son style a été profondément influencé par son séjour en Italie, où il a vécu de 1604 à 1614. C'est là qu'il a découvert les œuvres du Caravage, dont l'utilisation dramatique du clair-obscur (contraste entre lumière et ombre) et le réalisme intense ont marqué son approche artistique.
De retour à Utrecht en 1614, ter Brugghen est devenu l'un des premiers artistes néerlandais à adopter et à adapter le style du Caravage. Ses œuvres se caractérisent par des scènes religieuses et des portraits empreints d'une grande émotion, souvent mettant en scène des figures humaines dans des moments intimes ou dramatiques. Parmi ses sujets de prédilection figurent des scènes bibliques, des musiciens et des buveurs.
Ter Brugghen a développé un style unique qui combinait le réalisme caravagesque avec une sensibilité typiquement nordique. Ses couleurs étaient souvent plus chaudes et plus nuancées que celles de Caravage, et il avait un talent particulier pour représenter les textures et les expressions faciales. Ses compositions étaient soigneusement équilibrées, avec une attention particulière portée à la lumière et à l'ombre pour créer une atmosphère dramatique.
Parmi ses œuvres les plus célèbres, on peut citer :
- "La Vocation de saint Matthieu" (1621) : une interprétation personnelle de la célèbre scène du Caravage.
- "Le Concert" (1626) : une scène de musique mettant en valeur son habileté à capturer les émotions et les interactions entre les personnages.
- "Saint Sébastien soigné par Irène" (1625) : une œuvre émouvante qui illustre son talent pour les scènes religieuses.
Hendrick ter Brugghen est considéré comme l'un des principaux représentants du caravagisme d'Utrecht, aux côtés d'artistes comme Gerrit van Honthorst et Dirck van Baburen. Bien que sa carrière ait été relativement courte (il est mort à l'âge de 41 ans en 1629), son influence sur l'art néerlandais a été durable. Ses œuvres ont inspiré des générations d'artistes, y compris Rembrandt, qui a repris certaines de ses techniques de clair-obscur.
POURQUOI SAINTE CÉCILE EST
LA PATRONNE DES MUSICIENS ?
Selon la tradition, Cécile était une noble romaine du IIe ou IIIe siècle, convertie au christianisme. Elle aurait fait vœu de chasteté, mais fut contrainte d'épouser un homme nommé Valérien. Lors de la cérémonie de mariage, il est dit qu'elle "chantait dans son cœur à Dieu" (cantantibus organis, Cecilia virgo in corde suo soli Domino decantabat), une phrase tirée de la Passio Sanctae Caeciliae, un texte hagiographique du Ve siècle. Cette référence à la musique a conduit à l'associer aux instruments et au chant.
Au fil des siècles, Sainte Cécile a souvent été représentée dans l'art avec un instrument de musique, généralement un orgue, une harpe ou un luth. Ces représentations ont renforcé son image comme figure emblématique de la musique. Par exemple, des peintres comme Raphaël ou Le Dominiquin l'ont dépeinte entourée d'anges musiciens ou jouant elle-même de l'orgue.
La fête de Sainte Cécile, célébrée le 22 novembre, est devenue une occasion de célébrer la musique et les musiciens. Dès le Moyen Âge, des concerts et des festivités étaient organisés en son honneur, notamment en Angleterre et en France. Cette tradition a contribué à ancrer son statut de patronne des musicens.
Sainte Cécile est également associée à l'idée que la musique peut être un moyen d'exprimer sa dévotion et de se rapprocher de Dieu. Dans la tradition chrétienne, la musique sacrée joue un rôle central dans la liturgie et la prière. Cécile, en chantant intérieurement pour Dieu, symbolise cette union entre l'art musical et la spiritualité.
Au-delà de la religion, Sainte Cécile a inspiré de nombreux artistes, compositeurs et écrivains. Par exemple, Henry Purcell a composé une Ode to Sainte Cecilia, et Georg Friedrich Haendel a écrit un oratorio en son honneur et Joseph Haydn a écrit une messe à Sainte Cécile. Ces œuvres ont contribué à diffuser son image comme muse et protectrice des musiciens.
UNE MUSIQUE D'UN BONHEUR CONTAGIEUX
A- Ode à Sainte Cécile de PURCELL
https://youtu.be/UvWqPJdUImA?si=idyLNUUAm8zgxzdE
Hail! Bright Cecilia, appelée également Ode to St. Cecilia (Ode à sainte Cécile), est une œuvre pour voix et orchestre de Henry Purcell composée en 1692.
Cette pièce a été composée sur un texte de Nicholas Brady (en) pour la fête de sainte Cécile, patronne des musiciens.
Les festivités remontent à 1683 sur l'initiative de la Musical Society de Londres, réunion de musiciens et d'amateurs. Purcell avait déjà écrit quelques pièces pour les célébrations antérieures mais cette ode reste la plus connue. L'orchestre comprenait trompettes, timbales, flûtes à bec et basse, ainsi qu’un orgue, chaque instrument ayant une partie solo pour se valoriser. La première représentation fut un réel succès, l’œuvre ayant été bissée.
B- Ode à Sainte Cécile de HAENDEL
https://youtu.be/OrI7a3qHV9U?si=SdCEKBEIRaw32V4h
L'Ode for St. Cecilia's Day (HWV 76) est une œuvre lyrique de Georg Friedrich Haendel qu'il composa en 1739 sur un poème éponyme - en anglais - de John Dryden écrit en 1687, exaltant le rôle de la musique dans l'harmonie de l'Univers. Le titre réfère à Sainte Cécile, sainte patronne traditionnelle des musiciens.
Cette composition (« Ode ») se situe à mi-chemin de la cantate et de l'oratorio, tant en ce qui concerne la durée que l'importance de l'effectif musical. Elle comprend des pièces instrumentales, des arias solistes et des chœurs.
La première représentation eut lieu le 22 novembre 1739, jour de la fête de Sainte Cécile au Theatre in Lincoln's Inn Fields de Londres.
Haendel avait déjà composé une autre œuvre sur le même thème, dont le texte était aussi de Dryden : l'ode Alexander's Feast.
Un très grand nombre de thèmes musicaux proviennent des Componimenti musicali, recueil de sept suites pour le clavecin de Gottlieb Muffat composées vers 1736.
C- Ode à Sainte Cécile de HAYDN
https://youtu.be/2rZ8k00yQ-k?si=_kSHfl4HOhL8tvql
La Missa Cellensis in honorem Beatissimae Virginis Mariae en ut majeur par Joseph Haydn, Hob. XXII:5, Novello 3, a été initialement composée en 1766, après la promotion de Haydn comme maître de chapelle au Palais Esterházy à la suite de la mort de Gregor Joseph Werner.
Le titre original tel qu'il apparaît sur le seul fragment restant de la partition autographe de Haydn, qui a été découvert dans les années 1970 à Budapest, assigne clairement la messe au pèlerinage de Mariazell en Styrie. Jusqu'à cette découverte, le travail était auparavant connu comme Missa Sanctae Caeciliae, ou en allemand Cäcilienmesse, titre probablement attribué à la messe au cours du XIXe siècle.
Il a été suggéré que ce dernier titre est dû à l'exécution de l'œuvre par la Congrégation de sainte Cécile, une confrérie de musiciens viennois pour une fête de Sainte Cécile (un 22 novembre) mais cela reste totalement sujet à conjecture.
Le manuscrit original a pu être perdu dans l'incendie d'Eisenstadt en 1768 ; lorsque Haydn a réécrit la pièce de mémoire, il l'a augmentée. Il se peut que la messe comporte initialement seulement le Kyrie et le Gloria, et que les autres parties aient été ajoutées par la suite. Cette messe était connue d'Anton Bruckner.
VOUS AVEZ BON GOÛT !
Ce qui m'anime dans cette quête c'est la curiosité intellectuelle, le goût de la connaissance et l'envie de savoir. Si vous êtes comme moi, avec l'envie d'apprendre, aux rivages de la beauté musicale, picturale, poétique.
CULTURE JAI
(L'Histoire de l'Art en Musique)
https://vincentdelaplageculturejai.blogspot.com/
LES LUMIÈRES DE VERSAILLES
(Histoire Moderne en Musique)
https://leslumieresdeversailles.blogspot.com/
SING SANG SUNG
(Pop anglaise traduite)
https://singsangsungenglishmusic.blogspot.com/
CINÉ CINÉMA
(Netflix)
https://cinecinemavincent.blogspot.com/
#culturejaiflash
#leslumièresdeversailles
#SingSangSung
#cinésérie #cinécinéma
#jaimelhistoire
#uneespérancehumaine
#labeauteduvivant
#artmoderne
#peinturefigurative
#photosinstantannees
#lhumourenpolitique
#amusezvous
#lamusiquequejaime
#unjourunlivre
Commentaires
Enregistrer un commentaire