LA QUERELLE DU COLORIS entre POUSSIN et RUBENS, sublimée par WATTEAU
LA QUERELLE DU COLORIS
entre l’école de POUSSIN et celle de RUBENS,
sublimée par la palette de WATTEAU
« Ce qu'on aperçoit d'abord (...) est un groupe composé d'une jeune femme et de son adorateur. L'homme est revêtu d'une pèlerine d'amour sur laquelle est brodé un cœur percé, gracieux insigne du voyage qu'il voudrait entreprendre. (...) elle lui oppose une indifférence peut-être feinte (...) le bâton du pèlerin et le bréviaire d'amour gisent encore à terre. À gauche du groupe dont je viens de parler est un autre couple. L'amante accepte la main qu'on lui tend pour l'aider à se lever. (...) Plus loin, troisième scène. L'homme prend sa maîtresse par la taille pour l'entraîner. (...) Maintenant les amants descendent sur la grève, et, (...) ils se poussent en riant vers la barque ; les hommes n'ont même plus besoin d'user de prières : ce sont les femmes qui s'accrochent à eux. Enfin les pèlerins font monter leurs amies dans la nacelle qui balance sur l'eau sa chimère dorée, ses festons de fleurs et ses rouges écharpes de soie. Les nautoniers appuyés sur leurs rames sont prêts à s'en servir. Et, déjà portés par la brise, de petits Amours voltigeant guident les voyageurs vers l'île d'azur qui émerge à l'horizon. »
AUGUSTE RODIN
QU'EST CE QUE LA QUERELLE DU COLORIS ?
La querelle des poussinistes et des rubénistes ou querelle du coloris est un débat esthétique qui anima les peintres en France dans le dernier quart du XVIIe siècle. Elle surgit en 1671 à l'Académie royale de peinture et de sculpture à Paris, pour déterminer si, dans la peinture, le plus important réside dans le tracé ou dans la couleur.
D'un côté se situent les « poussinistes » — à partir de Nicolas Poussin —, un groupe d'artistes français qui pensaient que le dessin privilégiant la forme était le plus important. De l'autre côté se situent les « rubénistes » — à partir de Pierre Paul Rubens —, qui souhaitent privilégier la force de la sensation à travers la couleur. Il y avait un fort relent nationaliste incrusté au débat, Poussin étant français et Rubens étant flamand, bien qu'aucun des deux ne fût vivant lors de cette polémique.
(NICOLAS POUSSIN)
QUI ÉTAIT NICOLAS POUSSIN ?
Nicolas Poussin, né au hameau de Villers, commune des Andelys, en juin 1594 et mort à Rome le 19 novembre 1665, est un peintre français du XVIIe siècle, représentant majeur du classicisme pictural. Il est formé à Paris, mais il est surtout actif à Rome à partir de 1624. Il a peint aussi bien des scènes d'histoire que religieuses, mythologiques, mais aussi des paysages animés. Il a répondu à quelques commandes destinées à des églises, mais il est surtout connu pour des tableaux de taille moyenne destinés à quelques amateurs italiens ou français auxquels il reste fidèle tout au long de sa vie. Sa renommée lui permet de devenir peintre du roi et de revenir en France entre 1640 et 1642. Il préfère finalement repartir à Rome où il réside jusqu'à sa mort. Il est l'un des plus grands maîtres classiques de la peinture française et, bien qu'ayant eu très peu d'élèves, son influence est considérable sur la peinture française, de son vivant et jusqu'à nos jours. Entre 220 et 260 tableaux lui sont attribués, ainsi que près de 400 dessins.
(PIERRE PAUL RUBENS)
QUI ÉTAIT PIERRE PAUL RUBENS ?
Pierre Paul Rubens, ou Petrus Paulus Rubens, ou Peter Paul Rubens en néerlandais, et Pietro Paolo Rubens à partir de 1608, né le 28 juin 1577 à Siegen (Nassau-Siegen) et mort le 30 mai 1640 à Anvers, est un peintre baroque flamand.
Aidé par un atelier important, Rubens produit un œuvre considérable dans des genres divers. Il accepte de peindre un grand nombre de portraits mais, « d'instinct plus porté aux grand travaux qu'aux petites curiosités » comme il l'écrivait lui-même, il prête peu d'attention aux détails, qu'il ne peint pas en profondeur et dessine de quelques traits. En effet, il va travailler à un rythme extrêmement productif, réalisant 1403 peintures selon le catalogue de Michel Jaffé. Il réalise surtout de grands projets religieux, des peintures mythologiques, et d'importantes séries de peintures historiques. Prisé des Grands pour l'érudition et le charme de sa conversation, il joue également un rôle diplomatique important à son époque et jouit d'une position sociale sans égale chez les artistes de son temps.
POURQUOI LA QUERELLE DU COLORIS EST UN SUJET DES DISCORDES ?
La question est de savoir si la peinture est une activité de l'esprit, dans laquelle prédomine le dessin, expression d'une forme idéale, ou bien si elle influence l'esprit au moyen de la sensualité du regard, séduit par la couleur et l'apparence du réel. C'est à Paris, sous le règne de Louis XIV que les conférences de l'Académie royale de peinture et de sculpture donnent l'occasion aux deux opinions de s'exposer et de s'opposer.
(Et in Arcadia ego (« Les Bergers d'Arcadie »),
de Nicolas Poussin (1628-1630))
Philippe de Champaigne lance le débat en 1671 dans une conférence de l'Académie royale de peinture et de sculpture où il fait l'éloge de la couleur d'un tableau du Titien, en déplorant qu'« on ne sait pas que trouver de beau quand on le cherche bien. Il est vrai que cette recherche (...) la correction et la justesse des proportions (...) est plus à acquérir par l'effort de l'étude qu'à attendre de la nature ». Cette doctrine, qui oppose à la séduction de la couleur et du dessin d'un « beau corps » la difficulté de rendre visible la justesse des proportions, vient en réponse à des débats qui se sont jusque-là déroulés hors de l'Académie, dont tous les peintres et critiques ne sont pas membres.
Le peintre Gabriel Blanchard répond quelques semaines plus tard : « en diminuant le mérite de la couleur, on diminue celui des peintres ». Il suscite une réponse particulièrement véhémente de Jean-Baptiste de Champaigne, neveu de Philippe.
La direction de l'Académie, Charles Le Brun en tête, est favorable au dessin, qui constitue l'essentiel de l'enseignement de l'institution. En 1672, Charles Le Brun essaie de faire cesser cette dispute en disant officiellement que « la fonction de la couleur est de satisfaire les yeux tandis que le dessin satisfait l'esprit ».
(La Chasse à l'hippopotame, de Pierre Paul Rubens (1616))
Le critique d'art Roger de Piles publie en 1673 un essai intitulé Dialogue sur le coloris. Il y fait l'éloge de l'œuvre peint de Rubens, « qui a rendu le chemin qui conduit au coloris plus facile et plus débarassé » et porte à la connaissance du public un débat qui se tenait exclusivement au sein de l'Académie. Ses arguments convainquent notamment le duc de Richelieu, neveu du cardinal de Richelieu, de céder douze de ses peintures de Poussin pour se constituer une collection de peintures de Rubens. Entre 1677 et 1681, Roger de Piles publie deux autres ouvrages où il défend ardemment l'art du coloris, observation des « couleurs naturelles » et mise en œuvre des « couleurs artificielles », pâtes colorées qu'il dispose sur le tableau.
La dispute est similaire, quant aux arguments, à celle concernant les mérites du disegno et des colore dans l'Italie du XVe siècle. Elle acquiert en France un caractère particulier : l'Académie royale de peinture et de sculpture tenait le dessin pour le fondament de l'art et toute attaque contre celui-ci semble une attaque contre l'Académie. Le milieu artistique parisien est alors engagé dans des luttes de pouvoir autour de l'Académie, dont les membres ont le monopole des commandes royales, divisée entre les membres de l'ancienne Corporation des peintres et sculpteurs et les partisans de la nouvelle Académie sous contrôle royal. Le débat s'enflamme, passant de la controverse théorique à des polémiques accompagnées de pamphlets d'une certaine violence verbale, où les partisans de la couleur affirment que c'est « l'Envie, l'Ignorance et l'Intérêt » qui anime leurs adversaires.
Jusqu'à un certain point, le débat portait tout simplement sur le fait de savoir s'il était acceptable de peindre purement dans le but de procurer du plaisir au spectateur sans le noble et typique but de la peinture historique.
LES CONSÉQUENCES DE LA QUERELLE DU COLORIS ?
Après plus de 40 ans, l'Académie royale de peinture et de sculpture penche en faveur des rubénistes en acceptant Le Pèlerinage à l'île de Cythère d'Antoine Watteau comme morceau de réception en 1717. Le débat connaîtra plusieurs résurgences jusqu'au XXe siècle.
Le Pèlerinage à l'île de Cythère est un tableau d'Antoine Watteau, réalisé en 1717, et présenté par le peintre comme morceau de réception à l'Académie royale de peinture1. Il est reçu à l'Académie, qui crée spécialement pour lui le genre de la fête galante. Le tableau est aujourd'hui exposé au musée du Louvre.
En 1718, Watteau en fit lui-même une réplique sensiblement différente, intitulée Embarquement pour Cythère, ayant appartenu à Frédéric II de Prusse et exposée aujourd'hui au Château de Charlottenburg à Berlin.
(Embarquement pour Cythère)
DESCRIPTION DE L'OEUVRE DE WATTEAU
On ne peut déterminer par l'analyse picturale si les personnes viennent de débarquer sur l'île ou si au contraire, elles s'apprêtent à la quitter, à regret. Pour l'historien d'art anglais Michael Levey, le tableau représente le départ de l'île, et non pas le départ vers l'île3. En effet, plusieurs symboles érotiques laissent penser que l'île est celle de Cythère :
La Vénus enguirlandée dans les bois
La nacelle en forme de lit
Les couples déjà enlacés
Les allusions mythologiques (voir supra)
La jeune femme du couple de gauche, au premier plan, se retourne et regarde avec regret le lieu de son bonheur. C'est pourquoi il est possible que l'île soit déjà celle de Cythère et non celle d'un départ vers cette île. Il n'y a pas d'île au loin, ce qui aurait pu lever le doute ; lumière et clarté basse suggèrent la fin de la journée, crédibilisant d'autant l'hypothèse d'un retour. Cela expliquerait également l'aspect mélancolique de la scène quoique la nacelle, en forme de lit, garantisse que l'île une fois quittée, la passion ne s'éteindra pas.
CONCLUSION
Le débat et le développement parallèle du rococo dans la France du XVIIIe siècle ont été vus comme une forme de renouveau. Michael Levey signale que c'est pendant le XVIIe siècle que les nouvelles catégories de scène de genre, de peinture de paysage et de nature morte ont commencé à s'établir avec leur insistance sur l'observation de la nature, et par conséquent les principes rubénistes. Elles ont conduit au renouveau des traditions existantes du naturalisme et à l'appel pour une plus grande discipline en peinture, au lieu de représenter une attitude de liberté générale ou de laisser-faire, comme c'est souvent admis.
La dispute a lieu au début du Siècle des Lumières et les Rubénistes sont soutenus par Essai sur l'entendement humain de John Locke (1690), où il argumente que toutes les idées dérivent de l'expérience et ne sont aucunement innées. Jean-Baptiste Dubos observe que ce qui est compris dans l'esprit fait pâle figure face à ce qui l'est au travers des sens.
Dans la seconde moitié du XIXe siècle, Charles Henry présente aux artistes, critiques et amateurs son interprétation des travaux de Chevreul sur la couleur. L'américain Ogden Rood publie Modern Chromatics. L'argumentaire de Paul Signac, fondé sur l'existence d'une science de la couleur, renverse l'assignation du dessin à l'intellect et de la couleur à la sensualité.
Au XXe siècle, André Lhote reprend les arguments du XVIIe siècle, opposant « la couleur langage sensuel » et « le dessin langage spirituel » pour rejeter l'impressionnisme et saluer le cubisme ; il différencie encore, sur la base des choix que doit effectuer l'artiste entre des modes d'expression, « la peinture par la valeur pure et celle basée sur la seule couleur » ; mais la querelle du coloris est éteinte en ce qui concerne les relations de l'artiste à la beauté idéale.
UNE MUSIQUE D'UN BONHEUR CONTAGIEUX
André Campra - L'Europe Galante (1697) / Prologue
https://youtu.be/yrH2PJpufJ0
Auteur de nombreux motets très appréciés en leur temps, Campra est également considéré comme le principal compositeur d’opéra français entre Jean-Baptiste Lully (1632-1687) et Jean-Philippe Rameau (1683-1764).
C’est à la cathédrale Saint-Sauveur d’Aix-en-Provence, sa ville natale, qu’André Campra débute son apprentissage musical comme enfant de chœur avant d’y poursuivre sa formation au sein de la maîtrise, dirigée par Guillaume Poitevin (1646-1706). A 21 ans, il prend son envol et occupe deux postes de maître de chapelle, consécutivement à Arles et à Toulouse, où il reste 11 ans avant de monter à la capitale pour fuir une affaire de mœurs douteuses dans laquelle il est impliqué.
Il devient alors maître de musique à Notre-Dame de Paris, poste pour lequel il écrit de nombreux motets très appréciés. Parallèlement à cette activité, il compose des divertissements profanes.
Son premier ballet, L’Europe galante, obtient un succès considérable. Au tournant du siècle, il renonce à son poste à Notre-Dame pour se consacrer à l’opéra. Sa carrière oscille alors entre succès et échecs, se traduisant par des revenus aléatoires.
En 1714, il quitte Paris pour un bref passage à l’académie de musique de Marseille mais ses relations houleuses avec l’administration de l’institution mettent vite un terme à l’aventure. Il rentre donc à Paris, après la mort de Louis XIV, et bénéficie d’un regain d’intérêt sous la régence de Philippe d’Orléans, son protecteur. Il est nommé maître de musique à l’Académie royale de musique puis sous-maître à la chapelle royale de Versailles, nomination qui le pousse à composer davantage de musique religieuse.
A partir de 1730 (il a alors 70 ans !), il mène une double vie entre Versailles et Paris, où il est inspecteur pour l’opéra. Il détermine notamment le répertoire qui y est joué et c’est sous son exercice que sont créées les tragédies lyriques parmi les plus célèbres de Jean-Philippe Rameau (Hippolyte et Aricie, Castor et Pollux).
A cette époque, Campra est un musicien incontournable. Son statut ne l’empêche malheureusement pas de mourir pauvre et dans la solitude, entouré seulement de ses deux serviteurs, à l’âge honorable de 84 ans.
Aujourd’hui principalement connu pour son œuvre lyrique profane (opéra, cantates) – dont la quasi-totalité a été composée sous le règne de Louis XIV – Campra est également l’auteur de plusieurs messes et d’une centaine de motets, publiés en cinq livres.
VOUS AVEZ BON GOÛT !
Ce qui m'anime dans cette quête c'est la curiosité intellectuelle, le goût de la connaissance et l'envie de savoir. Si vous êtes comme moi, avec l'envie d'apprendre, aux rivages de la beauté musicale, picturale, poétique.
CULTURE JAI
(L'Histoire de l'Art en Musique)
https://vincentdelaplageculturejai.blogspot.com/
LES LUMIÈRES DE VERSAILLES
(Histoire Moderne en Musique)
https://leslumieresdeversailles.blogspot.com/
SING SANG SUNG
(Pop anglaise traduite)
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CINÉ CINÉMA
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