KARL SCHMIDT-ROTTLUFF (1884-1976)CET EXPRESSIONNISTE FLAMBOYANT
KARL SCHMIDT-ROTTLUFF
(1884-1976)
CET EXPRESSIONNISTE FLAMBOYANT
(Puissance de la couleur, liberté du trait)
Pour la prose, Dostoïevski est le maître des expressionnistes ; ceux-ci découvrent dans ses romans cette transparence derrière laquelle se meuvent les forces inconscientes et les énergies incontrôlées. Mais, là aussi, dans les œuvres les plus typiques, l'amour plane et enveloppe les damnés de la terre ; l'expressionnisme reste un idéalisme, et ce n'est pas sans raison qu'Albert Ehrenstein écrit : « Tout est réel, sauf le monde. »
Comme au théâtre, deux tendances apparaissent dans la prose expressionniste, qui, selon le cas, se contrarient ou se conjuguent : la démolition du réel bourgeois et le dégagement d'un nouveau réel rayonnant, juste et authentique. C'est ainsi que l'attaque menée par Heinrich Mann (1871-1950) contre l'Allemagne wilhelminienne dans son Professor Unrat (1905) place l'auteur à côté des expressionnistes et que la mise à nu de la construction du moi dans les fascinantes proses de Gottfried Benn est également dans les objectifs du mouvement. L'érotisme aussi est utilisé contre les tabous sociaux (Nouvelles et Timur de Kasimir Edschmid ; Aïssé de Schickelé).
Cependant, la dynamique expressionniste ne s'arrête pas aux thèmes : elle pulvérise la forme traditionnelle. Kurt Adler (1892-1916), dans Nämlich (Notamment, 1915) et Die Zauberflöte (la Flûte enchantée, 1916), bannit de ses romans l'action, dissout le temps, mêle les lieux ; Carl Einstein, dans Bebuquin, écrit entre 1906 et 1909, était même allé plus loin : personnages et actions avaient été supprimés – seule subsistait la vie imprévisible, aléatoire, imaginative des êtres et des choses.
Cependant et loin des œuvres avant-gardistes, c'est sans doute Alfred Döblin (1878-1957) qui, dans Die drei Sprünge des Wang-Lun (les Trois Sauts de Wang-Lun), donne en 1915 la prose expressionniste la plus typique. Ce roman, écrit en 1912-1913, nous mène en Chine ; le thème d'origine était l'insurrection des chercheurs d'or de la Lena et sa répression par les troupes du tsar – mais désirant aller au-delà du politique, atteindre le religieux et cette extase si caractéristique, l'auteur s'appuie sur le soulèvement de Wang-lun en 1774 : les Wu-wei (les Non-Agissants, que Döblin nomme les « Vraiment-Faibles ») se libèrent de la religion officielle et n'adorent plus que l'âme de l'univers ; ils renoncent aux biens de cette terre et s'abandonnent au destin pour atteindre le nirvana. Dans cette œuvre nous retrouvons les problèmes fondamentaux de l'expressionnisme : la révolte ou la soumission, le oui au monde ou le non, le royaume idéal, l'au-delà ramené sur cette terre. Comme toujours, il n'y a pas de conclusion : les Vraiment-Faibles sont écrasés ; mais ce n'est pas en vain : ils ont montré aux hommes l'exemple de leur sacrifice.
Les œuvres expressionnistes restent « suspendues » et indécises comme s'il leur manquait le point final ; elles sont comme le reflet de l'existence des poètes qui les créèrent ; rarement, en effet, une génération de créateurs fut à ce point persécutée, décimée, exilée. Parmi les poètes, K. Adler, G. Engelke, W. Ferl, A. Lichtenstein, E. W. Lotz, W. Runge, R. J. Sorge, Stadler, A. Stramm tombèrent sur les champs de bataille ; beaucoup durent fuir l'Allemagne en 1933, lorsque les hitlériens prirent le pouvoir : Becher, A. Ehrenstein, Einstein, Hasenclever, M. Herrmann-Neisse, Else Lasker-Schüler, K. Otten, E. Toller, von Unruh, Werfel, A. Wolfenstein, P. Zech ; certains ne trouvèrent pas à l'étranger l'hospitalité qu'ils auraient été en droit d'espérer et se suicidèrent. Et quand ceux qui avaient survécu purent, après la guerre, regagner l'Allemagne, l'expressionnisme était presque oublié.
A- L'EXPRESSIONNISME (1905-1920)
L'expressionnisme allemand s'est ramifié tant dans les arts plastiques et l'architecture que dans la littérature, le cinéma et le théâtre.
Localisé en Allemagne, il a cependant attiré à lui des artistes étrangers : russes, autrichiens, finlandais, etc.Il est d'autre part difficile de délimiter l'expressionnisme allemand dans le temps. Si l'on s'accorde pour le faire débuter en 1905 avec la création du groupe Die Brücke, les avis divergent quant à sa fin, généralement situé vers 1920, c'est-à-dire aux alentours de la fin de l'Empire de Guillaume II et des troubles politiques qui l'accompagnent.
L'expressionnisme renvoie effectivement davantage à une époque et aux idées qui s'y sont développées qu'à une école ou à un style précis.Le règne de Guillaume II, dernier empereur d'Allemagne, voit en effet apparaître des idées neuves, véhiculées par de jeunes gens désireux d'affirmer leur individualité dans une société bourgeoise et rigoriste. Les premiers à se manifester seront les peintres du groupe Die Brücke.
1. A l'origine du mouvement impressionniste
a. Une communauté d'artistes
Ce sont quatre étudiants en architecture, Fritz Bleyl, Ernst Ludwig Kirchner, Erich Heckel et Karl Schmidt-Rottluff qui fondent Die Brücke le 7 juin 1905 à Dresde.
Leur but est de renouer avec le principe d'une communauté d'artistes, cher aux romantiques allemands du 19e siècle. Par son biais, ils espèrent accéder à une émulation mais aussi à une certaine reconnaissance, eux qui n'ont reçu aucune formation académique.
A Kirchner revient l'idée de la création du groupe, à Schmidt-Rottluff celle de son nom, sans doute pour le double sens symbolique du mot, « le pont » comme moyen d'atteindre une autre rive, quelle qu'elle soit.
Le groupe accueillera par la suite quantité d'autres artistes. Ainsi, Emil Nolde sera membre actif entre début 1906 et fin 1907.
D'autres peintres, dits membres passifs, souvent étrangers, se joindront au groupe, comme le Hollandais Kees Van Dongen en 1908.
Bleyl quitte le groupe en 1907, d'autres l'intègrent, comme Max Pechstein (dès 1906) et Otto Mueller (à partir de 1910), qui tous deux contribueront de manière décisive à son évolution.
b. Travailler dans un univers idyllique
Heckel se charge de l'organisation du groupe, et découvre en septembre 1906 une cordonnerie désaffectée dans un quartier ouvrier de Dresde. Elle deviendra l'atelier dans lequel se réunit et travaille la communauté.
Son aménagement est en lui-même révélateur de l'esprit qui guide le groupe : les meubles, décorés de motifs exotiques, comme les batiks accrochés aux murs, ont été conçus par les artistes eux-mêmes. Ils se recréent donc un univers idyllique qui doit leur rappeler ceux évoqués par Gauguin, l'une de leurs principales sources d'inspiration.
Dans l'atelier, on peint mais on se lit aussi des poèmes et des textes de Nietzsche. Chaque activité se fait en accord avec une philosophie en élaboration, une vision du monde que les artistes explorent et qui les distingue de leurs contemporains français du fauvisme ou du cubisme, dont les recherches sont avant tout d'ordre esthétique.
2. Die Brücke comme philosophie de vie
Il n'y a pas véritablement de programme dictant aux membres de Die Brücke ce qu'il doivent faire ou penser. Le début d'ébauche d'un programme écrit par Kirchner sera même le motif de la dissolution du groupe en 1913.
Die Brücke proclame tout de même la jouissance sans contrainte de la vie dont il faut retrouver l'essence naturelle et sensuelle, primitive et sauvage, perdue depuis longtemps par la société bourgeoise.
Heckel dit : « Le non-savoir et le non-vouloir sont la source de l'énergie artistique ».
La libération des instincts, le rejet des falsifications qu'ils attribuent à l'art léché qu'apprécient les bourgeois, conduisent tout de même les jeunes peintres du groupe à adopter, dans leurs premières années, un style commun, inspiré de la nature dans laquelle l'artiste aspire à se fondre.
A travers le dessin, la peinture et la gravure sur bois, Kirchner et ses comparses renouent avec la passion de Van Gogh, avec la spontanéité de Gauguin, revendiquent une vision subjective et extatique de la vie.
La peinture est posée librement et rapidement sur la toile (grâce à la dilution de la pâte dans de l'essence) mais des tensions sont créées par apposition de couleur complémentaires.
Entre 1909 et 1911, les artistes séjournent à plusieurs reprises aux étangs de Moritzbourg, où ils peuvent s'adonner à la peinture en plein air et se donner l'illusion de retourner au coeur de la nature.
Les motifs récurrents apparaissent alors dans leurs oeuvres, hommes et femmes nues, seuls ou en groupe, se prélassant dans la forêt, se baignant dans des étangs, perdus dans une nature paradisiaque. Gravés, peints ou dessinés, ces thèmes sont repris par tous les artistes dans un même style vif, sec, tendu, instinctif, libéré des canons en vigueur, qui rend parfois malaisées les attributions à l'un ou à l'autres de leurs auteurs.
3. La translation vers Berlin à l'origine de la dissolution
a. La translation vers Berlin
La lente translation du groupe de Dresde à Berlin marque le début de l'affirmation de caractères et de styles différents.
Max Pechstein est le premier à s'installer définitivement à Berlin en 1908, suivi par les autres membres en 1911.
Berlin forme un fort contraste avec Dresde, par sa taille, par l'anonymat qu'elle procure, par l'évidence des inégalités sociales qu'elle recèle, par la vie intense, mouvementée, décadente qui l'anime et l'éloigne d'autant plus de la nature.
Kirchner, peintre ultra sensible, déchiré, y trouvera son compte et s'y perdra.
Tous exprimeront de manière différente les sensations que fait naître en eux la fréquentation de la ville.
La thématique de Die Brücke est bouleversée et incitera la plupart de ses membres à repartir de temps à autres pour la campagne, mais jamais plus tous ensembles.
b. La dissolution de 1913
Peu après, en 1913, Die Brücke sera dissoute à la suite de la présentation par Kirchner d'une chronique (Chronik der KG Brücke) qui se veut un résumé des activités du groupe depuis sa création.
Il est reproché à Kirchner de s'être trop mis en avant au détriment des autres.
Cette rupture ne fait pourtant que confirmer la dislocation déjà avancée de la communauté.
L'essentiel
Premier groupe constitué de l'expressionnisme allemand, le groupe Die Brücke en est représentatif par la liberté que veulent s'accorder ses membres.
Une recherche passionnée, spontanée, directe de la jouissance, le retour vers la nature, le rejet d'une société engoncée dans ses préceptes sont le seul programme que se sont fixés ces admirateurs de Van Gogh et Gauguin.
Né à Dresde en 1905, le groupe déménagera à Berlin en 1911. Entre ces deux pôles, tout change : le thème du retour à une nature paradisiaque, traité dans un style commun, vif, tendu, en rupture avec celui de leurs aînés, laisse place au thème de la ville, de ses bars, de son chaos, de son anonymat, et chaque artiste se forge alors un style propre. C'est le début de la fin du groupe Die Brücke, définitivement dissout en 1913.
Mais l'expressionnisme allemand lui survit, car il s'exprime au travers d'autres artistes et d'autres groupes, en particulier celui du Blaue Reiter («le Cavalier bleu ») qui sera aussi important que Die Brücke.
B- BIOGRAPHIE
Karl Schmidt-Rottluff (1884-1976)
Le peintre allemand Schmidt-Rottluff est l'un des représentants de l'expressionnisme allemand au début du siècle. Karl Schmidt (qui adjoignit plus tard à son nom celui de Rottluff, faubourg de Chemnitz où il avait vu le jour) vint à Dresde en 1905 pour étudier l'architecture. Il y retrouve Heckel et se lie avec Ludwig Kirchner et Fritz Bleyl.
Les quatre jeunes gens forment la même année la communauté à laquelle ils donnent le nom de Die Brücke (Le Pont), dont Schmidt-Rottluff restera membre jusqu'à sa dissolution en 1913. En 1911, il s'installe à Berlin, qu'il a peu quitté, si l'on excepte trois années sous l'uniforme (1915-1918) et un certain nombre de voyages, surtout vers 1930.
Rangé par le IIIe Reich au nombre des artistes dégénérés, il voit ses œuvres exclues des collections publiques et est soumis, sous contrôle policier, à l'interdiction de peindre en 1941. En 1947, il a été nommé professeur à l'Académie des beaux-arts de Berlin.
Les œuvres de Schmidt-Rottluff qui ont échappé aux destructions du IIIe Reich et de la guerre (son appartement brûla pendant le bombardement de Berlin) se trouvent surtout dans des collections allemandes, en particulier la collection Buchheim (à Bernried, en Bavière). Contrairement à nombre de ses contemporains, Schmidt-Rottluff a très peu écrit sur son art et peu parlé de lui.
Son œuvre peint se limite presque exclusivement à des paysages. Comme beaucoup de jeunes artistes de sa génération, il a d'abord adopté la manière (mais non la vision) des impressionnistes, avant d'être touché par l'exemple des fauves. Si l'on excepte Nolde — le Nolde des aquarelles —, il est de tous les artistes de la Brücke le plus coloriste ; il est le seul parmi eux à posséder le sens des compositions décoratives et monumentales, ce qui l'entraîne parfois aux limites de l'abstraction.
Après son retour à Berlin, en 1947, il continue à peindre, essentiellement des paysages. Dernier survivant du mouvement, il fonde à Berlin, en 1967, un musée consacré à Die Brücke. Schmidt-Rottluff a également pratiqué la gravure sur bois dont il tire des effets qui relèvent de la stylisation géométrique ou qui soulignent l'aspect brut ou inachevé du matériau, la lithographie, l'aquarelle, et enfin la sculpture où l'influence de l'art nègre est très sensible.
C- LE GROUPE DE DRESDE : DIE BRÜCKE
Le groupe d'étudiants formé à Dresde en 1905
Appel aux artistes, le manifeste de la Brücke était aussi un appel au public ; il s'agissait de créer un art vivant et dont on puisse vivre. On devenait membre de l'association pour douze marks par an, bientôt pour vingt-cinq marks.
Les membres recevaient tous les ans un portefeuille avec des lithographies ou des xylographies originales, et une sorte de rapport illustré. Aujourd'hui très rares et irremplaçables documents des débuts de l'expressionnisme, les portefeuilles présentèrent, de 1905 à 1908, les œuvres de Pechstein, Schmidt-Rottluff, Nolde, Heckel, Amiet, Bleyl et Gallén. Dans une autre série, de 1909 à 1912, chacun reçut son numéro personnel ; la couverture était une gravure sur bois originale en couleurs. Les rapports allaient du simple placard imprimé au couple de gravures sur bois. Les cartes décorées variaient tous les ans.
Le travail de la Brücke consistait donc non seulement en création, mais en manipulation et administration. Effort pour intégrer l'art dans la vie humaine, lui gagner des partisans, recrutés – il faut le noter – moins chez des gens professionnellement intéressés à la peinture que dans la bourgeoisie. L'organisation des expositions fut une des activités les plus importantes du mouvement.
Les deux premières, l'une de peinture, l'autre de gravures, eurent lieu dans le magasin de lampes Seifert, à Dresde-Löbtau, en 1906. L'année suivante, la galerie Richter ouvrit à la Brücke ses locaux impressionnants. Une quatrième exposition eut lieu, toujours à Dresde, en 1910, galerie Arnold. Un catalogue illustré, le premier, la présentait et portait la liste des adhérents.
La volonté de rester unie et indépendante retint la Brücke de s'intégrer dans la Nouvelle Sécession de Berlin qu'elle avait contribué à former. Une exposition commune eut lieu en 1912, à Berlin, chez Gurlitt. La même année, le groupe fut invité à l'exposition internationale du Sonderbund de Cologne. On le retrouve à l'exposition d'art graphique du Blaue Reiter, à Munich, en 1912.
CHORÉGRAPHIE
En danse, l'expressionnisme est une attitude esthétique, issue des théories de Rudolf von Laban (1879-1958), qui place le geste à l'origine du sentiment exprimé.
Préparée par les travaux de François Delsarte (1811-1871), par la danse libre (danse libérée des principes académiques) d'Isadora Duncan (1878-1927) et par les recherches gymniques et rythmiques d'Émile Jaques-Dalcroze (1865-1950), la danse moderne a trouvé ses bases mêmes dans l'expressionnisme.
C'est en Allemagne, où le ballet classique n'avait pas, à proprement parler, fait école, que naquit cette tendance. L'absence de tradition chorégraphique, telle qu'elle existait alors en France et en Italie, a permis à l'expressionnisme de se développer sous la République de Weimar et d'influencer non pas l'Europe, alors fermée à ce langage nouveau, mais l'Amérique. Le nazisme qui entrave l'essor du mouvement en Europe ne peut empêcher la diffusion de son enseignement aux États-Unis.
Rudolf von Laban, outre son principe fondamental reconnaissant la primauté à l'émotion et à certains gestes essentiels, réclamait une liberté totale d'expression ; le rythme était donné par le geste lui-même.
L'expressionnisme eut en Allemagne de nombreux adeptes : Mary Wigman (1886-1973), élève de R. von Laban, chez qui le mouvement est fondé sur l'opposition « tension-détente » et qui exploite la technique de groupe ; Kurt Jooss (1901-1979), élève également de R. von Laban, qui élabore une synthèse entre l'expressionnisme et la danse académique, et grâce à laquelle il parvient à une maîtrise totale des mouvements et des expressions ; Harald Kreutzberg (1902-1968), élève de Kurt Jooss et disciple de Mary Wigman, danseur soliste et mime, qui considérait l'expressionnisme comme la seule réalisation possible de la danse moderne ; Yvonne Georgi (1903-1975), un temps partenaire de Kreutzberg. L'expressionnisme connaît un renouveau et imprègne de façon sensible la danse moderne contemporaine avec Pina Bausch (1940-2009).
Mais c'est aux États-Unis que l'expressionnisme connut le plus grand succès. L'absence d'une école traditionnelle permit au courant expressionniste et à la danse libre de s'implanter. La plupart des danseurs et chorégraphes américains subirent cette influence. Si Martha Graham (vers 1893-1991) exploite l'opposition qui réside dans tout mouvement, Hanya Holm (1898-1992), à l'origine de son implantation dans ce pays, pense que l'expressionnisme est la seule manière de concevoir la danse dans ses rapports avec l'homme et l'univers. Doris Humphrey (1895-1958) et Charles Weidman (1901-1975), fondateurs d'une école, accordent aux mouvements une importance majeure. À leur suite, ou en même temps, s'affirment des personnalités intéressantes : Ruth Page (1905-1991), qui adapte l'expression corporelle à la danse classique, José Limón (1908-1972), un des meilleurs danseurs modernes ; Herbert Ross (né en 1926) ; etc.
À leur tour, les chorégraphes contemporains soumettent leur propre tempérament à ce qui est déjà une tradition et imposent des œuvres originales : Jerome Robbins, Alwin Nikolaïs (1912-1993), Paul Taylor, Merce Cunningham (1919-2009), etc. L'Angleterre n'est pas insensible à cette influence et se tourne peu à peu vers la « contemporary dance », tandis qu'en Italie Aurel Milloss (1906-1988), élève de R. von Laban, domine pendant de longues années le ballet italien. En France, cette tendance est représentée par Karin Waehner (1926-1999) qui fut élève de Mary Wigman, de Martha Graham, de José Limón, de Louis Horst (1884-1964) et de Merce Cunningham. D'origine allemande, elle s'est installée à Paris dès le début des années 1950 et a contribué à former les premiers danseurs modernes en France. Au tournant des années 1980, elle renoua avec ses racines expressionnistes et fut en 1982 la première à diriger une classe de danse contemporaine dans un conservatoire, à La Rochelle.
UNE MUSIQUE D'UN BONHEUR CONTAGIEUX
Quelques musiciens se sont ralliés au mouvement expressionniste, notamment les compositeurs de l'école de Vienne : Schönberg (Erwartung, Die glückliche Hand), Berg (Wozzeck, Lulu), Webern (Passacaille pour orchestre). Les éléments musicaux qui se rattachent à cette esthétique se caractérisent par un emploi intense du chromatisme et d'agrégats d'une richesse parfois excessive, aboutissant à une exaspération des sentiments, une tension, une frénésie teintées de pessimisme, voire de morbidité.
Arnold Schönberg: Pélleas und Melisande op.5 (1903)
https://youtu.be/-2SvMeyeOgQ
Compositeur, peintre et théoricien, Arnold Schoenberg a toujours considéré sa musique comme l’héritière authentique de la tradition classique et romantique allemande. Celui qui proclamait : « il y a encore beaucoup de bonnes musiques à écrire en do majeur » fut pourtant l’initiateur d’une révolution atonale sans précédent.
VOUS AVEZ BON GOÛT !
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